Restauration de deux plein veau: tranchefiles, coiffes, coins


Ces ouvrages sont des oeuvres de monsieur Spallanzani (« profeffeur royal d'hiftoire naturelle dans l'unifersité de Pavie, membre de la société royale de Londres, des Académies des curieux de la nature, de Berlin, de Stockholm, de Gottingue, de Bologne, de Sienne... ») intitulées : Opuscules de physique animale et végétale. Il s'agit d'une édition « augmenté de fes expériences fur la digestion de l'homme & des animaux; traduits de l'italien » par Jean Senebier, bibliothécaire de la république de Genève. De plus, « On y a joint plufieurs lettres relatives à ces opufcules, écrites à Mr l'Abbé Spallanzani par Mr Charles Bonnet & par d'autres naturalistes célèbres ». L'impression fut réalisée à Pavie en M.DCC.LXXXVII. et la page de titre précise que le livre « fe trouve à Paris chez Pierre J. Duplain, libraire, Cour du commerce, rue de l'ancienne Comédie Françoife ». Les oeuvres sont reliées en deux tomes et le texte est en français. Le premier tome est augmenté de six planches de gravures situées à la fin de l'ouvrage. Les reliures sont semblables.

   

   

Descriptions


- Plein veau raciné de couleur marron.

          - Cinq nerfs.

- Le dos comporte des dorures dans chaque caisson ainsi que sur les nerfs.

- Le titre se situe dans le deuxième entre-nerfs et la tomaison se situe dans le troisième.

- Les chants des cartons sont ornés d'un filet doré.

- Tranches teintes en rouge.

- Tranchefiles blanches et bleues.

- Gardes de couleurs : marbré tourniquet.


Détériorations

     

Tome I

- Coiffes très endommagées en tête et queue ; le cuir de couvrure est également fendu le long du mors.

- Une tranchefile a disparu et la seconde est en partie détruite.

- Les coins sont très abîmés.

- Le livre a pris l'eau en tête et le cuir est fortement marqué et racorni sur le plat avant.

- Les gardes de couleur sont fendues au niveau des mors.

- Le papier porte des traces d'humidité.

- Un trou, qui semble avoir été fait par un ver, est visible sur la face externe du plat arrière ; aucun dégât n'est visible sur la face interne.

- Le cuir est fendu au niveau du cinquième nerf sur le plat avant.

tome II

- La coiffe de tête est très abîmée.

- Le cuir semble fragilisé au niveau des mors.

- Le carton des coins est visible.

Le second tome est moins abîmé que le premier. En revanche, les restaurations envisagées sont de même type sur les deux ouvrages.

Interventions

- Réfection des coiffes endommagées avec tranchefiles pour le Tome I.

- Réparation des coins.

- Renforcement des mors faibles.

- Soins de conservation pour les peaux de couvrure.

- Réparation du trou et de la fente du cuir dans le Tome I

Les deux ouvrages seront restaurés en même temps avec la collaboration de monsieur Marchesseau qui effectuera le travail de restauration de la coiffe sur le Tome II à titre de démonstration.

Opérations

Coiffes

* Pour restaurer les coiffes, il faut dégager l’espace nécessaire au cuir neuf. Il est important d' enlever le cuir présent sur le dos et de le conserver pour le ré-incruster par la suite. Pour cela, il faut inciser la coiffe un niveau du nerf et le long du mors et ensuite décoller le cuir. Cette opération ne présente aucune difficulté en tête du Tome I car l'humidité a en partie déjà décollé le cuir. En revanche, cela présente plus de difficulté en queue. Le cuir est néanmoins récupéré et collé sur japon avec de la tylose dans l'attente des opérations ultérieures.

La peau est ensuite incisée le long des chants du carton afin de soulever une partie triangulaire du cuir sur le dessus de plats. Il est fait de même à l'intérieur des plats. Les languettes de cuir sur les chants sont aussi dégagées.

Jusqu'à présent, le procédé était le même pour tous les livres. En revanche, ici, il faut procéder différemment pour dégager les cartons sur la face interne des plats. Cela n'est pas dû au fait que seule la coiffe soit restaurée plutôt que le dos, mais au fait que les gardes sont en papier marbré.



En effet, le motif du papier permet d'inciser directement sur le plat sans avoir à intervenir au niveau du mors. Ceci présente de grands avantages car la page de garde est cousue et le fil est visible dans le mors.

On dégage toujours un volet triangulaire, mais l'ouverture est différente. Les parties découvertes sont ensuite nettoyées. Le dos reçoit de la tylose. Il est gratté et le reste de chair de cuir adhérant au carton en enlevé.

* Il faut alors choisir la peau, déterminer les dimensions, la couper et la parer :



Tranchefiles

Il faut réaliser de nouvelles tranchefiles pékinées sur le Tome I. Elles sont réalisées selon le modèle du Tome II, puisqu'il s'agit d'une série de deux livres identiques.

       



Les fils sont préparés avec une solution d'eau et d'acrylique bleu, puis il sont baignés dans du brou de noix dilué afin de leur donner la patine nécessaire. Les tranchefiles sont réalisées sur un bâtonnet.



L'excédent de bâtonnet est ensuite recoupé et les tranchefiles sont fixées avec un point de colle de pâte. Elles sont enfin renforcées par un morceau de japon (largeur du dos et hauteur plus importante que la tranchefile : les points de passe doivent être recouverts) qui est collé sur chacunes d’entre elles. Les points de passe sont ensuite retapés au marteau.

Couvrure

* La pose de la peau se fait comme une couvrure normale, à la colle de pâte. Il faut prendre soin d'éliminer les excédents de colle, de bien lisser la peau et de bien loger les cartons dans les mors. La peau se place à cheval sur le premier nerf, afin d'assurer une bonne tenue de la coiffe. Il faut ensuite laisser sécher quelques heures sous poids avec un non-tissé entre les deux peaux.



* Il faut ensuite refermer les volets qui ont étés dégagés pour faire la couvrure. Pour cela, il faut procéder comme il a été expliqué précédemment : élagage de la nouvelle peau aux endroits où elle sera recouverte et ponçage à la fraiseuse de l'ancienne peau.

On ne doit toujours plus sentir de sur-épaisseur au toucher.

* Le Tome I s'avère très altéré par l'humidité subie. Le cuir, durci et marqué, se décolle largement du plat et le carton est très mou et se délite. Il faut tout d'abord recoller les différentes strates du carton entre elles. Cela est fait à la colle de pâte. Ensuite, de la tylose est  passée sur toute la surface abîmée du carton. En séchant, elle le rigidifie. La peau est, quant à elle, légèrement humidifiée afin de lui donner de la souplesse. On insuffle alors de la colle sous la peau ainsi que sous le volet triangulaire, puis on la masse avec un plioir au travers d'un non-tissé. Toutefois, le cuir étant très fortement marqué, cela ne suffit pas, il faut mettre le plat sous presse. L'ancienne peau est alors recollée et les marques sont légèrement moins visibles. On procède ensuite au recollage des parties soulevées pour les autres côtés des coiffes, ceci sans mettre sous presse.

Coins

 * La restauration des coins se fait comme sur les autres livres. Elle ne présente ici aucune difficulté particulière.

  

Ré-incrustation du dos

Le cuir du Tome I est très dur et se ponce difficilement. Néanmoins, la récupération et la ré-incrustation des premier et dernier caissons est possible. Le collage se déroule ensuite sans difficulté. La ré-incrustation du cuir de tête se passe sans problème.



Gardes

* Il faut recoller les volets découpés dans les gardes de couleur. Cela demande beaucoup de précision car des fragments de claies ont étés découpés avec le papier. Or, le parchemin réagit très mal au collage. Il faut donc encoller grassement le revers des volets et laisser agir la colle de pâte 5 mn. Les matériaux ont ainsi le temps de réagir et de s'allonger. De fait, le collage et la remise en place du fragment selon les motifs s’effectue sans problème.




Il faut ensuite renforcer les mors (petite charnière en japon élagué) aux endroits où ils sont fendus. Le collage se fait à la colle de pâte et le séchage à livre ouvert. Une petite lacune dans les gardes de couleur du Tome I est comblée au japon.

Réparations et soins du cuir

* Il faut tout d'abord combler le trou « de ver » sur le plat arrière du Tome I. Pour cela, il faut récupérer de la poussière de parure, la mélanger à de la colle de pâte puis loger le mélange dans le trou. En ce qui concerne la fente du cuir au niveau du cinquième nerf du plat avant du Tome I le procédé employé est similaire. On prend cette fois ci un morceau de chair dont la forme correspond à la lacune puis on le colle en le logeant dans le fente. Il faut employer le côté chair et non la fleur pour ce type de réparation car contre toute attente, une réparation avec de la chair est moins visible.

* Il faut ensuite renforcer la résistance du cuir au niveau des mors. Pour cela, on masse très doucement le cuir à la klucel g. Les propriétés de cette substance rendent une certaine élasticité au cuir.

Dorure

* Un peu d'or est passé au pinceau sur le dos aux endroits où la dorure a disparu. De l'or est aussi ajouté sur les nerfs recouverts par le cuir de la nouvelle coiffe. Cela doit rester discret et uniquement raviver délicatement la dorure.



Patine

* Il faut ensuite patiner les parties visibles du cuir neuf. On utilise toujours l'eau de colle, l'eau claire et le brou de noix. Après cela, on passe de la 213.

Finissure

Il faut ensuite nettoyer les fonds de cahiers et mettre en presse. Après la visiture, la restauration est achevée.

     



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